CHAPITRE XVI
Luke se réveilla l’esprit troublé, comme chaque fois qu’il rêvait du visage, la poitrine oppressée par une tâche inaccomplie, l’estomac serré par la prémonition d’un échec. Il lui apparaissait à demi dissimulé par un capuchon, ne trahissant que l’ombre d’une apparence. Le Maître Jedi entrapercevait une bouche tordue comme celle d’un supplicié, un front figé dans un froncement de sourcils désapprobateur, des yeux noirs brûlant d’une malice éternelle. Il n’en voyait jamais assez pour savoir s’il s’agissait toujours du même visage, mais les émotions venaient dans le même ordre : douleur, condamnation, mépris. Luke ignorait ce que cela voulait dire, mais il était certain qu’il s’agissait d’un avis de tempête.
Un sifflement s’éleva à l’autre bout de l’élégante cabine de l’Ombre de Jade, où R2-D2 se tenait en travers de la porte, se balançant d’avant en arrière sur ses bras de support. Luke s’offrit le luxe d’utiliser la Force pour repousser le petit droïde dans le couloir et referma les yeux. Depuis qu’il avait appris que Lumiya travaillait avec la GAG, il était si inquiet pour Ben qu’il avait à peine dormi – et quand il y arrivait enfin, des rêves perturbaient son sommeil, et il ne se réveillait jamais reposé.
R2-D2 fit entendre un trille impatient, puis tendit son bras de charge et avança.
— Très bien – pas besoin de la sonde à ronto, fit Luke en s’asseyant au bord du lit. Je suis réveillé.
R2-D2 émit un doute, mais s’arrêta et rétracta son bras tandis que Luke enfilait ses bottes. Une vibration lancinante suggérait que l’Ombre avait émergé de l’hyperespace et décélérait, sans doute dans sa phase d’approche finale de Hapes. Luke pouvait sentir l’impatience de Mara à travers leur lien dans la Force, mais pas quelle en était la cause. Peut-être les défenses aériennes hapiennes lui donnaient-elles du fil à retordre – ou peut-être était-elle impatiente de soustraire Ben à l’influence que Lumiya avait sur Jacen et la GAG.
Quand il eut attaché ses bottes, Luke attrapa sa robe et se dirigea vers le salon d’observation. Les faces creusées de cratères de deux lunes argentées glissaient par la verrière tribord de l’Ombre. Par l’autre, une demi-douzaine de traînées laissées dans les sillages d’autant de vaisseaux se superposaient au velours noir piqueté d’étoiles de l’espace. Au loin, il vit un disque blanc, immobile – sans doute l’un des Dragons de Bataille qui devaient faire un bouclier autour de Hapes depuis la tentative d’assassinat.
Luke continua jusqu’à la passerelle de pilotage, d’où le disque moucheté de nuages de la planète était visible droit devant. Ses îles boisées et ses océans scintillants étaient toujours aussi beaux, mais il fut plus intéressé par l’appareil en forme de coin qui semblait dériver devant. Le Destroyer Stellaire n’était pas blanc, mais d’un noir mat, avec le dôme reconnaissable d’un générateur de puits de gravité sous son ventre.
C’était la première fois que Luke voyait le nouveau Destroyer Stellaire de la GAG. Il ne l’aima pas beaucoup – et surtout, cela le dérangeait qu’il porte le nom d’Anakin Solo, celui de son neveu mort.
Une partie de la verrière devint opaque, et le visage de Mara apparut, l’air concentré et inquiet.
— Nous venons de recevoir un holo-enregistrement, dit-elle.
— De Jacen ?
Elle secoua la tête.
— De Han, relayé par l’HoloNet du Temple Jedi.
— Vraiment ? fit Luke, haussant les sourcils, car avant de partir, ils avaient été prévenus de la participation des Solo à l’attentat contre Tenel Ka. Explique-t-il pourquoi leurs clones étaient sur Hapes quand quelqu’un a essayé de tuer la Reine Mère ? Parce que c’est vraiment la seule chose qui aurait le moindre sens !
— Pas exactement, répondit Mara. En fait, leur message rend toute cette histoire encore plus confuse. Han et Leia espionnent les conspirateurs.
— Vraiment ? (Luke plissa le front, essayant de reconstituer une suite logique d’événements qui avait pu amener les Solo de Corellia à devenir des espions pour l’Alliance Galactique.) Tu as raison, c’est déroutant – comme tout ce que font Han et Leia. Que dit le message ?
— Ils ont appris l’identité de l’un des chefs. Han veut que nous passions l’info à Tenel Ka aussitôt que possible.
Luke regarda par la verrière, où l’Anakin se découpait, droit devant l’Ombre.
— Alors pourquoi nous dirigeons-nous vers l’Anakin ?
— J’ai essayé de relayer le message à Tenel Ka. Mon signal a été redirigé vers le Prince Isolder, qui m’a suggéré de recommencer quand je serai à bord de l’Anakin.
— L’Anakin ? (Luke étendit sa perception vers le Destroyer Stellaire et il ne lui fallut pas longtemps pour trouver la présence de Tenel Ka.) Que fait-elle là ?
— Elle protège Allana, j’en suis sûre. Je doute qu’elle ait eu besoin de Han pour lui dire qu’il y avait un traître dans son entourage – et que sa fille était tout autant une cible qu’elle-même.
— Alors elle s’est tournée vers Jacen, dit Luke.
Il fut frappé – comme il l’avait déjà été plusieurs fois – par la solitude et la tristesse de la vie de Tenel Ka. Elle avait tant sacrifié pour garantir un gouvernement humain et stable au peuple de son père.
— Je suppose que c’est logique.
Mara acquiesça.
— Quand on ne peut faire confiance à ses nouveaux amis, on se tourne vers les anciens. (Elle se tut un moment, puis ajouta :) Surtout si l’un d’eux est un ami intime.
Luke haussa les sourcils.
— Tu crois que Jacen et Tenel Ka sont amants ?
— Il s’éclipse pour voir quelqu’un plusieurs fois pas an.
— Mais Tenel Ka ? (Il essaya de l’imaginer avoir des rendez-vous secrets avec un homme aussi dangereux pour son trône que Jacen et secoua la tête.) Si elle n’était pas la Reine Mère, peut-être. Mais ils n’ont pas d’avenir ensemble.
— Et tu crois que ça les arrêterait ?
— Jacen, peut-être pas. Mais un amant Jedi pourrait causer de graves ennuis à Tenel Ka. Elle ne prendrait pas un risque si inconsidéré – peu importent ses sentiments pour lui.
Mara ne parut pas convaincue.
— Tenel Ka doit avoir quelque chose pour elle. Elle a donné tout le reste au Consortium.
— D’accord, c’est possible, concéda Luke.
Il ne comprenait pas pourquoi il trouvait l’idée si alarmante – était-ce à cause de ses craintes au sujet de Jacen ? Ou bien était-ce plus profond que ça ? Peut-être craignait-il que la corruption de Lumiya ne se répande plus vite qu’il ne pouvait la contenir.
— Raison de plus pour ne pas spéculer à ce sujet. Nous pourrions mettre Tenel Ka en danger.
— Très bien, dit Mara. Mais n’es-tu pas un peu curieux au sujet d’Allana ?
— Si, admit-il. Mais Jacen ne peut pas être le père.
Elle fit la moue, expression qui n’avait pas sa place sur son visage décidé.
— Rabat-joie.
— Si c’est impossible, je n’y peux rien. (Soudain, Luke éprouvait le besoin d’expliquer son raisonnement – peut-être parce que Mara l’avait fait douter.) Pendant six mois après la Bataille de Qoribu, Jacen a été confiné à l’Académie sur Ossus, avec tous les autres Jedi impliqués – et c’est à ce moment qu’Allana a été conçue. Si Jacen s’était glissé dans le lit de Tenel Ka, nous l’aurions su.
Mara lâcha un soupir dégoûté.
— Tu n’es pas drôle.
— D’accord ! (Réalisant qu’elle le faisait marcher, Luke sourit et leva les mains.) Je me rends. Je suis certain que nous pouvons trouver une autre explication. Nous savons qu’il a rendu visite à Tenel Ka pour lui poser des questions sur la flotte qu’elle a envoyée à Qoribu. La gestation d’Allana a peut-être duré une année.
Mara tressaillit d’un inconfort tout empathique.
— Maintenant, tu es cruel. (Elle regarda le fauteuil du copilote, qui se reflétait comme elle dans la verrière.) Assieds-toi. Tu as l’air d’avoir lutté contre un rancor pendant ton sommeil.
— Si seulement. (Luke se glissa dans le siège derrière elle.) C’était encore le visage.
L’expression de Mara devint sérieuse.
— Jacen ?
Il haussa les épaules.
— Peut-être. Je ne le vois jamais clairement.
— Alors tu n’es sûr de rien.
— Il s’agit d’un homme, répondit Luke. (Il pouvait sentir combien Mara était inquiète pour Ben, combien la relation entre Lumiya et la GAG l’alarmait – alors pourquoi ne comprenait-elle pas ce qui arrivait à Jacen ?) Qui cela pourrait-il être d’autre ?
— C’est ce que je veux dire, Luke. Nous l’ignorons.
Jusqu’ici, le seul lien entre Jacen et Lumiya, c’est ces preuves suggérant qu’elle travaille avec la GAG.
— Et ça ne t’inquiète pas ?
— Comme un gundark dans un zoo d’animaux de compagnie, répondit Mara. (Elle tourna son regard vers l’Anakin Solo, qui grossissait de plus en plus dans leur verrière.) Mais il y a une grande différence entre des soupçons et des faits. Et si Lumiya ne travaille pas pour la GAG ? Et si quelqu’un à la GAG travaille pour elle ?
— Tu crois qu’elle a perverti l’un des subordonnés de Jacen ?
— Je crois que nous devons envisager cette possibilité, corrigea-t-elle. Tu n’aimes pas ce que Jacen fait avec la GAG, alors tu es disposé à imaginer le pire. Tout ce que je dis, c’est que nous ne pouvons pas laisser nos émotions affecter notre jugement.
Luke resta silencieux un long moment, puis expira lentement.
— Tu as raison – peut-être que je présume le pire parce que je n’aime pas les méthodes de Jacen. Mais ton conseil vaut pour nous deux, tu sais. Je crois que tu t’aveugles au sujet de Jacen parce qu’il est celui qui a convaincu Ben de ne plus avoir peur de la Force.
Mara hocha la tête.
— Je plaide coupable. C’est pourquoi nous devons travailler ensemble, Skywalker. Nous devons veiller à rester honnêtes... et si nous n’aimons pas ce que nous allons découvrir, nous aurons besoin l’un de l’autre plus que jamais.
Son ton lui fit froncer les sourcils.
— Que veux-tu dire ?
— Tu le sais très bien, Skywalker. Si tu as raison – si Jacen est en train de me berner – il ne sera pas facile à maîtriser. Nous devrons nous y mettre à deux.
Luke plissa le front, surpris par le ton glacé de Mara.
— Que fais-tu de cette certitude que tu as éprouvée dans l’Arène ? Tu as dit que nous devions laisser Ben suivre son propre chemin, que la Force l’avait attiré vers Jacen pour une raison.
— Je le crois toujours, dit Mara. Mais nous avons nos propres chemins à suivre. Peut-être est-ce là qu’ils convergent tous – là que celui de Ben rejoint les nôtres.
— Seulement celui de Ben ? (Luke commençait à sentir un peu de l’ancienne Mara resurgir, et cela l’effrayait.) Et Jacen ?
— Si j’ai tort, Jacen n’en aura aucun, dit-elle. Nous devrons y mettre un terme.
— Je crois que maintenant, c’est toi qui imagines le pire. Je suis inquiet pour Jacen, mais je ne veux pas le tuer.
— Alors tu n’es pas réaliste. S’il travaille avec Lumiya, nous n’aurons pas le choix. Je ne le laisserai pas entraîner Ben avec lui.
— Non, bien sûr – mais quoi que soit devenu Jacen, c’est dû à ce qui s’est passé pendant qu’il était prisonnier des Yuuzhan Vong – et c’est moi qui l’ai envoyé en mission. (Luke marqua une pause, car il avait encore du mal avec la décision qui avait coûté la vie à son neveu Anakin et à tant d’autres jeunes Jedi – il se demandait encore s’il n’aurait pas pu faire autre chose pour sauver l’Ordre.) Je n’abandonnerai pas Jacen parce qu’il s’est perdu en route. S’il est tombé sous la coupe de Lumiya, je le ramènerai vers la lumière.
La réflexion de Mara croisa le regard de celle de Luke.
— Pourquoi cela ne m’étonne-t-il pas ?
Il lui adressa un sourire innocent.
— Parce que tu as l’habitude de me voir faire l’impossible ?
— Quelque chose comme ça, soupira-t-elle. (Elle regarda de nouveau vers l’Anakin, qui se silhouettait sur l’un des océans hapiens.) Tu ferais bien de ne pas penser à racheter Lumiya aussi. Parce que je fixe la limite aux ex-petites amies.
— Ne t’inquiète pas. Même moi je ne suis pas si naïf. Lumiya doit disparaître.
La com crachota, puis un contrôleur du trafic aérien donna à l’Ombre la permission d’approcher. Pendant les minutes qui suivirent, alors que la masse de l’Anakin continuait de grossir, ils furent occupés à faire des corrections de trajectoire et à répondre aux vérifications d’identité. Deux XJ5 sortirent pour confirmer leurs identités en visu et agacèrent Mara en allant se mettre dans l’angle mort de son vaisseau.
Enfin, quand ils furent si près que tout ce qu’il pouvait voir, c’était le Destroyer Stellaire, le contrôleur leur donna l’autorisation de se poser dans le Hangar du Commandant. Mara plongea sous le ciel de duracier noir qu’était le ventre de l’Anakin, puis manœuvra vers une entrée protégée par deux tourelles de canons laser.
Elle fit pénétrer le bouclier à l’Ombre, puis suivit la piste éclairée jusqu’à l’emplacement qu’on lui avait attribué.
Dès que l’Ombre fut posé, vingt soldats de la GAG arrivèrent par une écoutille. Ils formèrent deux colonnes et pivotèrent pour se faire face. Une seconde plus tard, Jacen apparut et s’avança entre les haies d’honneur, la cape noire de son uniforme de colonel flottant dans son dos.
— Sait-il seulement à qui il ressemble ? demanda Mara en débouclant sa ceinture.
— Oui, s’il a pris la peine de se regarder dans un miroir. (Luke était déçu de ne pas voir Ben avec son cousin, mais pas réellement surpris, car il n’avait pas senti son fils quand il avait cherché Tenel Ka.) J’espère que ce n’est pas exprès. Parce qu’il pourrait aussi bien être un holo de recrutement pour les terroristes corelliens.
Luke étendit de nouveau ses perceptions à tout le Destroyer Stellaire, cherchant un indice de la présence de Lumiya à son bord. Il sentit une personne possédant la Force près de Tenel Ka – sans doute sa fille, Allana – mais rien d’assez sombre pour être la Sith. Bien sûr, cela ne signifiait rien. Jacen était devant lui et il aurait tout aussi bien pu être à l’autre bout de la galaxie.
Quand tous les systèmes eurent été mis en veille, les Skywalker se dirigèrent vers l’arrière et trouvèrent Jacen en bas de la rampe. Son visage était terne et ridé, et des cernes violets marquaient son regard, signe qu’il n’avait pas beaucoup dormi. Il s’inclina devant Mara, puis devant Luke.
— Maîtres Skywalker, bienvenus à bord de l’Anakin Solo. (La voix de Jacen était chaleureuse, mais il était impossible de connaître ses sentiments.) Quelle heureuse surprise !
— Tu ferais bien de réserver ton jugement, fit Mara. Nous avons à parler.
— Bien sûr, répondit Jacen, qui n’avait pas bougé, ne leur permettant pas de débarquer. Y a-t-il un problème ?
— En effet, répondit Luke. Où est Ben ?
— En mission. Il ne peut pas être joint pour le moment, mais si vous voulez, je peux...
— Nous en reparlerons plus tard – en privé. (Luke devait lutter pour garder une voix normale, car avec Lumiya en liberté, il n’aimait pas savoir son fils en mission où que ce soit.) Pour commencer, nous devons parler à la Reine Mère. Nous avons un message urgent pour elle.
Jacen écarquilla les yeux.
— Tenel Ka ?
— Tout de suite, Jacen, dit Luke. Et nous aurons besoin d’un holoprojecteur.
Jacen exhala vivement.
— Très bien. (Il s’écarta et prit leur tête.) Je suis navré d’avoir hésité, mais elle m’a demandé de garder le secret sur sa présence ici. Son chambellan et le Prince Isolder sont les deux seuls Hapiens au courant.
Ils passèrent une écoutille et gagnèrent un petit foyer où quatre hommes de la GAG gardaient des turbo-ascenseurs. La plupart de ceux-ci avaient une destination bien précise, comme INGÉNIERIE OU COMMUNICATIONS. Seul l’un d’eux, assez grand pour contenir cinq personnes, n’avait pas de pancarte.
— Il descend au Centre de Détention, expliqua Jacen, voyant que Luke le regardait. Nous avons découvert que les détenus résistent moins s’ils ignorent qu’ils ont atteint le bout de leur voyage.
— Très... pratique, répondit le Maître Jedi, essayant de ne pas paraître alarmé par les connaissances de son neveu en matière de détention et d’interrogatoire. Je présume qu’il en résulte également moins de blessures.
— Ça aussi, acquiesça Jacen.
Un frisson de révulsion courut le long de l’échine de Luke, mais si Mara partageait ses sentiments quant à l’indifférence de Jacen pour le bien-être des prisonniers, elle n’en montra rien. Elle se contenta de le suivre jusqu’à un ascenseur marqué PASSERELLE, puis elle entra dans le tube et s’éleva hors de vue.
— Après toi, dit Jacen à Luke.
Celui-ci fit signe à R2-D2 de passer devant, puis il lui emboîta le pas. Son estomac lui tomba dans les bottes quand les parois du tube devinrent floues autour de lui. Une seconde plus tard, tout s’arrêta, et il sortit dans une antichambre en duracier, où d’autres gardes veillaient sur plusieurs écoutilles ouvertes sur des couloirs bleu-blanc.
Un seul mur en transparacier, le seul sans ouverture, donnait sur la passerelle, un niveau au-dessous. La majorité des officiers portaient encore l’uniforme bleu et gris du personnel normal des Destroyers Stellaires de l’Alliance Galactique, mais il ne put manquer la fierté et le sens du devoir qui émanaient d’eux. Quelles que puissent être les fautes de Jacen, il était un bon chef.
Celui-ci sortit de l’ascenseur derrière Luke et s’adressa à un officier à la peau ébène :
— Sergent Darb, envoyez une escorte à la salle de conférences et informez la Reine Mère que les Maîtres Skywalker désireraient lui parler. Nous l’attendrons dans la cabine de briefing.
— Bien, colonel.
Le sergent salua et partit. Jacen tourna le dos à la passerelle, emmenant le droïde et les Skywalker dans une salle de conférences dernier cri, avec une grosse unité holocom. Chaque siège était pourvu de commandes dans l’un des accoudoirs.
Jacen se dirigea vers une chaise à un bout de l’ovale, puis se tourna vers ses visiteurs.
— J’ai bien peur que le sergent Darb n’ait besoin de plusieurs minutes pour revenir avec la Reine Mère. Puisque l’on a attenté à ses jours, j’ai insisté sur un protocole de sécurité de Niveau Cinq, même à bord de l’Anakin.
— Cela ne peut pas faire de mal, observa Mara. Même si d’après ce que j’ai vu, ton équipage semble particulièrement concentré et alerte. Il est difficile d’imaginer qu’un assassin puisse déjouer la sécurité dans de telles conditions.
— Merci. Venant de toi, tante Mara, c’est un compliment. (Il s’assit et les invita à prendre un siège.) Il y a un menu des boissons, si vous voulez boire quelque chose.
Luke resta debout.
— Nous n’avons pas soif, merci.
— Je vois. (L’air déçu, Jacen s’avança sur le bord de son siège.) Alors pourquoi ne pas parler de ce qui vous ennuie ? Je sais que vous désapprouvez mes méthodes, mais l’hostilité que je sens est plus profonde que ça, et cela me peine. Ben et vous êtes la seule famille qui me reste.
— C’est faux, protesta Mara. Il y a aussi Jaina et tes parents !
— Vous savez que mes relations avec ma sœur sont tendues. J’ai peur que son insubordination à Corellia n’ait été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Nous ne nous parlons plus, et je ne vois pas comment ça pourrait s’améliorer.
— Les choses auraient peut-être été différentes si tu ne l’avais pas fait comparaître.
— Qu’aurais-je pu faire d’autre ? Détourner les yeux parce qu’elle est ma sœur ? (La voix de Jacen craqua, mais son expression resta confiante et il ne cilla pas.) L’Alliance Galactique ne peut pas survivre si ses chefs font du favoritisme. C’est pour ça que Corellia pense qu’elle n’a pas besoin de respecter les lois. Or celles-ci s’appliquent à tout le monde ou à personne.
Luke n’avait pas besoin de la Force pour sentir la conviction derrière les paroles de son neveu. Elle était comme une chaleur émanant de Jacen – et qui devait brûler quiconque s’approchait trop près.
— Et tes parents, alors ? demanda Mara. Vas-tu leur tourner le dos parce qu’ils ne croient pas en la même chose que toi ?
— Non, parce qu’ils ont tenté d’assassiner la souveraine d’un État membre de l’Alliance – une personne qui a toujours été leur amie. (Jacen se leva.) Mes parents sont de la vermine terroriste, et c’est pour ça qu’ils ne font plus partie de ma vie.
Le feu dans le regard de Jacen exprimait tout autant sa douleur qu’il était intense, et Luke commença à comprendre combien son neveu était seul. Il avait perdu son jeune frère pendant la dernière guerre galactique et renoncé à sa sœur et à ses parents dans sa tentative pour en éviter une autre. Et dans sa bataille contre le mal qu’il voyait menacer la galaxie, il était prêt à sacrifier également son oncle et sa tante.
Comme les Yuuzhan Vong dont il avait été le captif, Jacen était devenu capable de tous les sacrifices – et il se montrait intolérant envers ceux qui ne partageaient pas ses vues. Jacen Solo n’était pas égoïste, il en était arrivé là parce qu’il était au contraire désintéressé.
— Jacen, je sais que les actes de tes parents portent à confusion, dit Mara. Mais tu dois te fier à ton cœur...
— Laisse-le juge, coupa Luke. (Leur seul espoir de ramener Jacen, c’était de lui faire un électrochoc – le laisser découvrir par lui-même qu’il avait tort.) Pour le moment, je m’intéresse davantage à l’endroit où est Ben.
— Il est à bord d’un skiff de reconnaissance, répondit Jacen. Je vous proposerais de le contacter, mais ils sont dans les Brumes Transitoires.
— Que fait Ben là-bas ? demanda Mara.
— Il est à la recherche de Jaina et de Zekk. Ils sont allés sur Téréphon pour délivrer un message de Tenel Ka, et ils ne sont pas encore revenus. J’ai envoyé un appareil pour enquêter sur leur disparition, et Ben est parti à son bord pour aider à les chercher grâce à la Force.
— Seul ? fit-elle d’une voix cassante.
— Non, bien sûr. Il est avec une excellente équipe. (Il fronça les sourcils, inquiet.) Qu’y a-t-il ?
— Ne t’ai-je pas dit que Lumiya était revenue ? (Le ton de Luke rivalisait avec celui de Mara.) Et combien je suis inquiet qu’elle puisse vouloir m’atteindre à travers mon fils ?
— Oui, mais c’était sur Coruscant. Je ne crois pas qu’il faille vous inquiéter ici.
— Pourquoi pas ? demanda Mara. Parce que tu es sûr que Lumiya ne s’intéresse pas à Ben ?
L’expression de Jacen se fit indignée.
— Et comment le saurais-je ?
— Jacen, nous avons trouvé l’appartement de Lumiya, dit Luke. Nous savons qu’elle travaille pour la GAG.
Jacen ouvrit de grands yeux. Ce n’était pas une réaction déplacée, étant donné le sujet, mais Luke aurait aimé que son neveu ne soit pas si bon à dissimuler ses sentiments.
— Tu peux penser que tu l’utilises pour atteindre tes objectifs, continua-t-il. Mais tu te trompes. Lumiya a toujours eu les siens propres...
— Elle travaille pour la Garde ? interrompit Jacen. Comment ça ?
— Ne nous insulte pas en le niant, dit Mara. Elle vit dans un lieu sûr de la GAG, et elle a accédé à ses dossiers sur le Parti de la Véritable Victoire.
— Alors c’est elle qui a assassiné les Bothans ? demanda Jacen. Pourquoi ? Qu’aurait-elle à gagner dans une nouvelle guerre ?
— Inutile de changer de sujet, dit Luke. (Il ne pouvait dire si la surprise de Jacen était réelle ou feinte, aussi présumait-il qu’il jouait un rôle.) Nous savons qu’elle est partie avec vous. Elle a quitté son appartement le jour où l’Anakin est parti.
— Tu crois qu’elle nous a suivis ? (Jacen appuya sur un bouton.) L’Anakin doit rester ici pour aider la Reine Mère, mais je vais prendre un skiff et...
— Nous nous occuperons de ça nous-mêmes, dit Mara. Et quand ce sera fini, Ben rentrera avec nous.
— Tu penses que c’est sage ? (Une lumière prévint Jacen que la communication était établie, mais il l’ignora.) Interrompre la formation de Ben ne pourrait que servir le jeu de Lumiya. Et elle pourra l’avoir plus facilement sur Coruscant.
— Ben en a fini avec la GAG, dit Luke. J’ignore encore comment Lumiya est impliquée avec elle, mais je sais qu’elle l’est. Ma décision est sans appel.
Jacen se décomposa.
— Très bien. (Il désactiva son unité com, puis se reprit et continua :) Il y a un dépôt de carburant à Roqoo, juste en dehors des Brumes. Vous pourrez y retrouver Ben.
— Merci, répondit Mara.
Jacen hocha la tête, l’air absent, puis il dit :
— J’espère que vous partagerez les détails de votre enquête. Si l’un de mes hommes utilise Lumiya comme agent, j’ai besoin de le savoir.
— Bien sûr. Tresina Lobi a essayé de suivre Lumiya pendant quelque temps. (Luke avait décidé de déformer la vérité quelque peu, en partie parce qu’il espérait apprendre ce que Jacen savait des liens entre Lumiya et la GAG.) Apparemment, elle a réussi, parce que nous avons retrouvé son corps sur la Place de l’Amitié le matin où nous sommes partis pour Hapes.
— La Place de l’Amitié ? (Cette fois, le choc de Jacen était réel, Luke le sentit dans la Force.) Maître Lobi est morte ?
— Oui, confirma Mara, et Luke sentit qu’elle étudiait Jacen de près. Mais pas avant d’avoir pu communiquer l’adresse de Lumiya au Temple.
L’histoire de Mara était encore plus éloignée de la vérité que celle de Luke – et elle sembla distraire Jacen encore plus. Il ne réussit qu’à murmurer un :
— Comme c’est... dommage.
Luke se demandait comment ils allaient pouvoir garder Jacen dans cet état d’esprit pour continuer d’exercer une pression sur lui, quand la porte s’ouvrit. Tenel Ka entra, vêtue d’une combinaison de vol en élétrotex suffisamment moulante pour révéler qu’elle s’entraînait toujours régulièrement. Elle s’avança vers Luke et Mara, son sourire radieux en désaccord avec l’aura de tension et d’inquiétude qu’elle avait dans la Force.
— Maîtres Skywalker ! Merci d’être venus. (Elle étreignit Luke, puis Mara.) Vous n’étiez pas attendus, mais soyez les bienvenus. Nous aurons besoin de toute l’aide que nous pourrons trouver.
— Merci, Votre Majesté, répondit Luke. Malheureusement, nous sommes ici pour une affaire différente.
— Mais nous sommes porteurs d’un message qui vous sera utile, ajouta Mara.
— J’espère qu’il provient de l’Alliance, disant quand ses renforts arriveront.
La femme qui venait de parler suivait plusieurs pas derrière Tenel Ka. Elle était grande, avec un nez long et une bouche aux coins tombants.
— Nous lui avons prêté tant de vaisseaux que nous nous retrouvons désavantagés.
Tenel Ka s’empourpra, mais elle se retourna à demi et fit poliment signe à la femme d’approcher.
— Maîtres Skywalker, permettez-moi de vous présenter mon chambellan, Dame Galney, la sœur cadette de la Ducha Galney de Téréphon.
Luke nota qu’il s’agissait de la planète où Ben avait été envoyé, mais il ne fit aucun commentaire et s’inclina devant la Hapienne.
— Le chef d’État Omas et l’amirale Niathal rassemblent une flotte considérable, dit-il. Elle devrait pouvoir partir dans une semaine.
— Une semaine ! s’écria Dame Galney. Mais alors les usurpateurs auront miné les voies hyperespace et seront en train d’attaquer Hapes !
— Inutile de vous inquiéter au sujet des mines, Dame Galney, assura Mara. Les vaisseaux de l’Alliance sont équipés pour s’en débarrasser. Quand la flotte de défense sera en route, rien ne pourra la retarder très longtemps.
— Évidemment, dit Tenel Ka d’une voix qui exprimait plus de confiance qu’elle n’en ressentait. Est-ce là le message que vous avez mentionné ?
— En fait, non, répondit Luke. Mais il n’est adressé qu’à vous seule.
Il coula un regard à Dame Galney, qui le traita par le mépris et ne bougea pas.
— Je suis la conseillère de plus haut rang de la Reine Mère. Afin de remplir mon rôle, je dois avoir les mêmes informations qu’elle.
— Alors je suis sûre qu’elle vous rapportera tout plus tard. (Mara la prit par le bras et la conduisit vers la porte.) Mais nos instructions sont très claires.
Jacen se leva.
— Dans ce cas, je vais sortir aussi.
— Non, reste. (Luke lui fit signe de se rasseoir.) Tu as besoin d’entendre ça autant que Tenel Ka.
Jacen haussa les sourcils mais il obéit. Mara poussa Dame Galney dehors et demanda au sergent Darb de la raccompagner à sa cabine.
— Je suis navré, Votre Majesté, dit Luke à Tenel Ka. Mais il est possible qu’un membre de votre entourage soit un traître.
Elle hocha la tête.
— Oui, j’ai eu des prémonitions – mais je ne crois pas qu’il s’agisse de Dame Galney. (Elle sourit.) Je le sais encore quand quelqu’un me ment, vous savez. C’est une idiote – mais elle est honnête.
— Ça ne veut pas dire que vous deviez lui confier vos secrets, dit Mara, revenant près de la Reine Mère. Quand on porte tant d’intérêt aux affaires d’autrui, on ne les garde pas pour soi.
— Oh, je compte là-dessus. L’Anakin Solo étant en orbite au-dessus de Hapes, j’ai besoin de quelqu’un pour rapporter aux médisants que je ne partage pas la couche de son commandant Jedi. (Elle regarda Jacen et sourit de nouveau.) De plus, sa sœur, la Ducha Galney, est l’une de mes nobles les plus dévouées. Cela me sert de donner l’illusion d’avoir une relation spéciale avec Dame Galney.
Luke grogna, sidéré.
— Votre vie est un labyrinthe, Votre Majesté. Je ne sais pas comment vous faites.
— J’ai été bien préparée, Maître Skywalker, répondit Tenel Ka, solennelle. Et je vous en remercie chaque jour.
Luke rougit, mais il put néanmoins répondre :
— Vous m’avez toujours rendu fier, Tenel Ka.
— Même si nous sommes déçus de n’avoir pas encore rencontré Allana, ajouta sévèrement Mara. Mais nous allons la voir avant de repartir, j’espère ?
Jacen eut l’air alarmé.
— Ce ne sera pas...
— Peut-être, coupa Tenel Ka. Mais comme Jacen s’apprêtait à vous le dire, Allana a été choquée par la tentative d’assassinat – particulièrement par le fait qu’une Jedi ait été impliquée. Il faudra probablement remettre cela à une prochaine fois.
Luke et Mara échangèrent un regard surpris. Soit ce n’était encore qu’une excuse, soit les rumeurs d’une difformité de naissance étaient vraies. Dans l’un ou l’autre cas, ils devaient accepter la parole de Tenel Ka.
— Je suis navré d’entendre ça, dit Luke. J’avais hâte de la voir.
— Le message dont nous sommes porteurs devrait vous éclairer sur la participation de Leia, ajouta Mara avec un soupçon de pétulance. (Elle semblait penser que Tenel Ka aurait dû savoir que les Solo n’auraient jamais tenté de la tuer.) Joue l’enregistrement de Han, dit-elle à R2-D2.
Le droïde acquiesça d’un bip, puis s’approcha de l’unité holocom et inséra son bras d’interface dans la prise. Une image floue et rosée apparut aussitôt au-dessus de la plaque de projection et prit la forme du visage de Han Solo. Il était pâle et sa bouche était tordue par une grimace de douleur.
Luke fut aussitôt inquiet – Mara ne l’avait pas averti que Han était blessé – mais quand il jeta un coup d’œil à son neveu, les yeux de celui-ci étaient durs et froids.
— Écoute, petit gars. (La voix de Han était basse et rauque, comme s’il avait peur qu’on l’entende.) Je n’ai pas beaucoup de temps – nous avons une personne à bord qui ne doit se douter de rien. Relaie cet holo à Tenel Ka... et à Tenel Ka seule. Quelqu’un parmi ses proches est un traître, et ça pourrait mal tourner pour nous si ce message tombait dans les mauvaises mains.
L’image changea pour montrer le profil d’une belle Hapienne aux boucles brunes et aux pommettes hautes. Elle semblait être penchée sur quelque chose – Luke se dit qu’il s’agissait d’un banc ou d’une table, jusqu’à ce qu’il la voie sortir un tube de baume au Bacta d’un tiroir de l’infirmerie du Faucon.
La voix de Han reprit :
— Cette femme dit s’appeler Morwan, mais c’est peut-être une fausse identité. Elle était chirurgienne sur le Kendall pendant la Bataille de Qoribu. Nous pensons qu’elle est au service de la famille AlGray des Lunes de Réléphon. C’est elle le contact entre le Conseil de l’Héritage et la tueuse qui s’est échappée avec nous.
L’image changea pour une autre de la même femme, de face cette fois. Elle était encore plus belle ainsi, avec ses lèvres pleines et ses yeux en amande.
— Nous l’avons entendu dire à l’assassin de se charger d’Allana en premier, continua Han.
La photo s’évanouit, et il réapparut, l’air encore plus mal qu’un instant auparavant.
— Luke, Tenel Ka doit prendre cette menace au sérieux. Le nom de l’assassin est Aurra Sing...
Luke fut si choqué que pendant un moment, il n’entendit plus la voix de son vieil ami. Il connaissait le nom d’Aurra Sing, trouvé dans les Archives de l’ancien Ordre Jedi qu’il avait pu rassembler et étudier au fil des ans.
— ... pense qu’elle était une sorte de Jedi il y a quatre-vingts ans, disait Han. C’est tout ce que nous savons, mais il y a autre chose. Ouvrez l’œil, Alema Rar est de retour. Nous sommes tombés sur Jagged Fel sur la Station Telkur, et...
Il se tut et regarda par-dessus son épaule, puis il murmura :
— Je dois y aller. Dites à Tenel Ka que nous sommes désolés pour ce qui s’est passé au palais. Gejjen a tenté de se servir de nous.
L’hologramme s’arrêta, plongeant la salle dans le silence. Bien que Luke soit intrigué par la mention d’Alema Rar et de Jagged Fel, il n’y accorda pas plus d’une pensée. Il était plus intéressé par la réaction de son neveu.
La présence de Jacen dans la Force était toujours profondément enfouie et illisible, mais il regardait le sol en fronçant les sourcils et respirait profondément. Luke résista à l’envie de lui suggérer qu’il avait eu tort de douter des Solo. Si Jacen avait une chance de rejeter l’emprise du Côté Obscur, il devait redécouvrir par lui-même qu’un Jedi faisait tout autant confiance à ses sentiments qu’à ce qu’il voyait.
Tenel Ka fut la première à rompre le silence.
— Merci de m’avoir montré ça. Il est plus facile de croire que les Solo se soient fait duper qu’il ne l’était de penser qu’ils avaient essayé de me tuer.
Luke fut surpris de voir Jacen acquiescer.
— Et ça explique les contradictions dans les témoignages, dit-il. Mes parents ont été utilisés par Gejjen, et quand ils l’ont réalisé, ils ont dû essayer d’empêcher l’attaque.
Un profond sentiment de soulagement réchauffa Luke. Non seulement Jacen était ouvert à l’idée que ses parents étaient innocents, mais il cherchait des raisons de le croire. Soudain, Luke était plus confiant. Quelles que soient les relations de son neveu avec Lumiya, il saurait le détourner du Côté Obscur.
— Je déteste jouer les trouble-fête, dit Mara. Mais on dirait qu’ils nous invitent à un banquet de Hutts.
Luke plissa le front.
— Qu’est-ce que ça signifie ?
Il voulut lui dire d’arrêter d’implanter des doutes dans l’esprit de leur neveu, mais il sentit grâce à leur connexion dans la Force qu’elle voulait s’assurer que Jacen comprenait son erreur. Elle désirait être sûre qu’il croyait dans son cœur que non seulement ses parents étaient innocents mais qu’ils auraient été incapables de ce dont on les accusait.
— Tu penses que c’est de la désinformation ?
— Je dis que ce message est très pratique. (Mara se tourna vers Jacen.) S’ils sont impliqués, c’est le meilleur moyen de faire taire les soupçons – et de nous refiler de fausses informations.
Le regard de Jacen s’écarquilla.
— Je suis surpris par tes propos, tante Mara. (Il y avait du ressentiment – et de la colère – dans sa voix.) Je pensais que tu avais une plus haute opinion de mes parents.
Mara ne baissa pas les yeux.
— Justement, et c’est pour ça que je pense qu’ils sont suffisamment habiles pour nous duper. (Elle marqua une pause puis, avec un timing impressionnant, elle se tourna vers Tenel Ka, comme si l’opinion de Jacen ne comptait pas.) C’est la guerre, et les Solo combattent pour l’autre camp. Nous devons être prudents.
— Et considérer qui ils sont, ajouta Jacen, se tournant également vers la souveraine. Vous connaissez mes parents. Ils ne sont pas des meurtriers. Je crois que nous devons croire ce message.
Le cœur de Luke se remplit de joie. Jacen restait en contact avec ses émotions – et cela voulait dire qu’il pouvait espérer le ramener vers la lumière.
Au bout d’un moment, Tenel Ka hocha la tête à l’adresse de Jacen.
— Moi aussi. (Elle adressa un sourire d’excuse à Mara.) Vous l’ignorez, mais certains témoignages laissaient à penser que les Solo étaient de mon côté au cours de l’attaque. Maintenant, je sais qui croire.
— C’est votre décision. (Malgré la réponse de Mara, Luke sut qu’elle était aussi heureuse que lui des résultats de son petit jeu.) Je voulais m’assurer que vous considériez toutes les possibilités.
— Et je vous en remercie – ça n’a pas dû être facile. (Tenel Ka se tourna vers Jacen.) Nous devons tous deux annuler nos ordres concernant vos parents.
— Vos ordres ? demanda Luke.
— Capture et détention, expliqua Jacen. (Il réfléchit un instant, puis il secoua la tête.) Non, impossible. S’ils ont raison au sujet du traître à la cour...
— ... et nous savons que c’est le cas, coupa-t-elle.
— ... tout arrêter leur ferait plus de mal que de bien, termina Mara.
Jacen hocha la tête.
— Oui, nous signerions leur arrêt de mort.
— Très bien, dit Tenel Ka. Jusqu’ici, ils ont été plutôt doués pour nous échapper. Nous devons réfléchir à ce que nous allons faire au sujet d’AlGray et de son Conseil de l’Héritage.
— Il n’y a qu’une chose à faire, répondit Jacen.
— Exactement. (Tenel Ka s’approcha de lui.) Je n’ai aucun droit de vous demander...
— Si, bien sûr. Vous ignorez lesquels de vos commandants vous restent fidèles, et le Consortium de Hapes est un membre loyal de l’Alliance Galactique. Notre devoir est de vous aider de toutes les manières possibles. Mais j’ai peur que l’Anakin Solo ne suffise pas – si ma mémoire est bonne, la Maison AlGray possède douze Dragons de Combat.
— Correct – et je vous donnerai une flottille suffisante pour assurer votre victoire, dit Tenel Ka. Mais ce n’est pas de ça que je voulais parler.
— Non ?
Tenel Ka lui prit la main.
— Je dois rester pour commander la Flotte. Mais puisque Aurra Sing veut tuer Allana, elle ne peut pas rentrer avec moi. Jusqu’à ce que tout ça soit fini, elle sera plus en sécurité à bord de l’Anakin.
— En êtes-vous sûre ? demanda Mara, alarmée. Jacen pourrait aller au combat.
— Et moi j’irai, c’est certain, répondit Tenel Ka, presque cassante. AlGray n’est pas seule dans ce Conseil de l’Héritage. Quand nous nous attaquerons à elle, les autres s’en prendront à nous. Et Hapes deviendra un endroit bien plus dangereux que ce vaisseau pour Allana.
Mara acquiesça, un peu surprise par le ton de Tenel Ka.
— Bien sûr. Je ne voulais pas mettre votre jugement en cause.
— Si, répondit Tenel Ka d’un ton radouci. Et je vous en remercie, car cela n’arrive plus ces jours-ci. De plus, Jacen ne verra pas la bataille d’aussi près que moi, et il sera mieux armé. Il est ma meilleure option. (Elle marqua une pause, comme si elle venait d’avoir une idée.) À moins que vous et Maître Skywalker ne retourniez directement à Coruscant.
— Navrée, fit Mara. Allana ne serait pas plus en sécurité avec nous.
— Nous devons retrouver Ben, expliqua Luke. Et terminer cette affaire laissée en suspens avec Lumiya.